Il n'y a pas de saison pour la mort
Maurice Ajzen raconte Auschwitz-Birkeneau, Varsovie, Dachau...
On le sait, la mort, la survie de ceux qui ont traversé l’horreur d’Auschwitz a travaillé leurs enfants, petits-enfants, neveux, nièces, jusqu’à pousser ceux-ci à entreprendre une psychanalyse, voire à devenir analyste. Catherine Saladin-Grizivatz est de cette génération. Le travail (tripalium) chez les Romains était le nom d’un instrument de torture. Ce travail l’a conduite à forcer la mémoire de son oncle Maurice Ajzen, jusqu’à l’obliger à se souvenir de l’impensable. Ils arrivent par rafales, stridents comme les sirènes du camp, les souvenirs dans les phrases de Maurice Ajzen lorsqu’il s’entend raconter, entre rires et sanglots, ahuri de la chance qu’il a eue de survivre, incrédule comme nous le sommes devant sa propre vitalité, qui semble ne lui avoir été consentie que pour une autre épreuve terrible : dire.
Hannah Arendt a voulu nous accoutumer à l’idée de la banalisation du mal. Mais l’horreur, elle, défiera toujours la banalisation. Qui d’entre nous peut lire le récit de Maurice Ajzen, comme ceux de Primo Levi et d’autres, sans être traversé un instant par l’espoir fou du déni : non, ce n’est pas possible, ça n’a pas existé? Si. En témoigne l’incrédulité de celui, de ceux à qui Auschwitz est arrivé. Le soleil ni la mort, dit La Rochefoucauld, ne peuvent se regarder en face. Ni la shoah. Une psychanalyse personnelle ni la patience courageuse de l’historien, comme le montre Pierre Vidal-Naquet, ne suffisent à approcher de la violence de l’histoire qui ne cesse en chacun : poussant les uns à vouloir savoir, les autres à croire un oubli possible, d’autres à nier : les révisionnistes.
Mais comment ce Nacht und Nebel, rayé de noir, a-t-il pu se retrouver seul dans l’autobus pour déportés qui lui a fait visiter Paris avant de le conduire à l’hôtel Lutétia d’où il a préféré «s’échapper» pour rentrer chez lui à pied, avec sa canne et ses phlegmons aux jambes? Il n’y a pas de parole pour dire la vie, l’incroyable vie qui a pu se condenser en ce gamin juif de Paris
contre la mort, chaque jour, hors du temps, pas même la parole de Hôlderlin : Nous sommes un signe, sans souffrance, sans désignation et nous avons presque perdu la parole au pays étranger.
Hannah Arendt a voulu nous accoutumer à l’idée de la banalisation du mal. Mais l’horreur, elle, défiera toujours la banalisation. Qui d’entre nous peut lire le récit de Maurice Ajzen, comme ceux de Primo Levi et d’autres, sans être traversé un instant par l’espoir fou du déni : non, ce n’est pas possible, ça n’a pas existé? Si. En témoigne l’incrédulité de celui, de ceux à qui Auschwitz est arrivé. Le soleil ni la mort, dit La Rochefoucauld, ne peuvent se regarder en face. Ni la shoah. Une psychanalyse personnelle ni la patience courageuse de l’historien, comme le montre Pierre Vidal-Naquet, ne suffisent à approcher de la violence de l’histoire qui ne cesse en chacun : poussant les uns à vouloir savoir, les autres à croire un oubli possible, d’autres à nier : les révisionnistes.
Mais comment ce Nacht und Nebel, rayé de noir, a-t-il pu se retrouver seul dans l’autobus pour déportés qui lui a fait visiter Paris avant de le conduire à l’hôtel Lutétia d’où il a préféré «s’échapper» pour rentrer chez lui à pied, avec sa canne et ses phlegmons aux jambes? Il n’y a pas de parole pour dire la vie, l’incroyable vie qui a pu se condenser en ce gamin juif de Paris
contre la mort, chaque jour, hors du temps, pas même la parole de Hôlderlin : Nous sommes un signe, sans souffrance, sans désignation et nous avons presque perdu la parole au pays étranger.
Genre littéraire
Études et monographies
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Détails
192 pages - 140 x 225 mm
EAN
9782207245675
Date de parution
Postface :
Pierre Vidal-Naquet
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